Au bord de la Méditerranée, face à la Sicile, la capitale tunisienne s’étire de sa médina classée au petit village de Sidi Bou Saïd, de la villégiature de La Marsa aux ruines de la mythique Carthage. Successivement comptoir pour les marchands phéniciens, retranchement militaire, grande cité espagnole puis ottomane, son paysage urbain se dessine notamment sous l'époque coloniale, période à laquelle s'adosse une véritable ville européenne au pied des anciens remparts. Après une révolution sous tension qui avait entraîné la fuite des touristes, la Tunisie sort fièrement de sa torpeur. Un vent nouveau souffle sur la capitale, les places et les échoppes reprennent vie. Tunis retrouve son âme, mélange singulier d'effervescence et de langueur. Dans cette volonté de renouveau, les femmes et la jeunesse jouent un rôle majeur et tentent de faire bouger les lignes. Tour d’horizon et conseils pour profiter au mieux de 24 heures à Tunis.
08h00
Petit-déjeuner au sommet
La journée commence sous les meilleurs auspices au Dar Ben Gacem, ancienne résidence d’une famille de parfumeurs datant du XVIIe siècle. A l’abri du monde, cette petite maison d’hôtes nichée au cœur de la médina dispose d’une adorable terrasse ouverte sur les toits de Tunis. Habillée de quelques tables et baignée de soleil, c’est une réelle invitation au lâcher-prise. Au menu du petit-déjeuner maison (particulièrement copieux), une profusion de pains et confitures, fruits frais, omelettes et autres spécialités locales, accompagnés d’oranges pressées. De quoi faire le plein d’énergie pour une journée de visites. Et pour varier les plaisirs, le lendemain matin, on pourra préférer le patio – refuge ombragé où se côtoient les pierres de Carthage et les céramiques andalouses. Une grande table d’hôtes peut aussi y être dressée.
Dar Ben Gacem - Instagram
9h30
Un tour au hammam traditionnel
L’eau étant sacrée et la propreté très importante dans la religion musulmane, c’est tout naturellement que le hammam, ou le bain à la vapeur, s’est enraciné dans la culture arabe. A tout âge, aller aux bains fait partie intégrante de la vie des habitants de la médina de Tunis, pour qui le hammam est un lieu de purification et de détente autant que de socialisation. Les murs chaulés renferment les murmures et secrets partagés par des générations de Tunisois, qui s’y retrouvent pour s’adonner aux soins du corps tout en conversant. Si bon nombre des hammams traditionnels de la médina ont été fermés ou ont disparu, il en subsiste une bonne vingtaine qui accueillent les fidèles du quartier.
ODG/fotolia.com
11h00
Se perdre dans les ruelles de la médina
Classée patrimoine mondiale de l’Humanité par l’Unesco en 1979, la ville ancienne vit au rythme de ses habitants. Dès le petit matin, la médina s’éveille – elle est verte, bleue, fleurie. Les artisans s’affairent et mettent en place leurs étals sous les passages voûtés : tanneurs, bijoutiers d’or et d’argent et parfumeurs sont rangés par quartier. Dans celui des étoffes, le tissage de la soie dévoile encore un savoir-faire ancestral. Cuivre martelé, confection des chéchias, ciselage du bois… les métiers artisanaux se succèdent dans l’enchevêtrement des ruelles. Ici et là, des palais, dars et médersas ouvrent parfois leurs portes aux visiteurs curieux. Longtemps délaissée par la bourgeoisie, la médina retrouve aujourd'hui ses lettres de noblesse grâce une vaste campagne de réhabilitation ainsi qu’à la venue de nombreux artistes séduits par le charme de l'ancienne kasbah.
Olivier Metzger
13h00
Gastronomie et art
Dans l’épicentre de la médina, Fondouk El Attarine est installé dans un ancien caravansérail posé au milieu des souks. Cette belle demeure à la très agréable cour intérieure servant de terrasse se présente avant tout comme une adresse gastronomique de charme. Des bricks à l’œuf en passant par les tajines, couscous (dont un fameux couscous de poisson) et riz aux calamars, les best-sellers de la cuisine traditionnelle tunisienne sont à la carte. Le lieu abrite également la maison de l’artisanat, qui propose tissus, maroquinerie, parfums, tapis ou encore poteries. Réservation conseillée.
Fondouk El Attarine - Instagram
15h00
La ville antique de Carthage
Pour s’échapper de Tunis sans trop s’éloigner, direction le site archéologique de Carthage, à une vingtaine de kilomètres, en empruntant la ligne ferroviaire TGM (pour Tunis-Goulette-Marsa). Inauguré dans les années 1870, ce train permet de rallier la côte à faible allure, fenêtres grandes ouvertes, en compagnie des locaux. Fabuleux témoin de l’histoire antique, le nom de Carthage évoque à lui seul le passé glorieux de cette ancienne puissance méditerranéenne, ennemie de Rome. Aujourd’hui situés en périphérie de la capitale, les vestiges de la cité portuaire ont eux aussi été classés à l’Unesco. A pied ou à vélo, seul ou en compagnie d’un guide, on y parcourt la colline de Byrsa, le quartier punique, l’amphithéâtre ou encore les thermes d’Antonin. En contrebas, le lacis de ruelles débouche sur de très jolis patios intimes ou de petites échoppes artisanales.
laguna35/Fotolia
17h00
Le village de Sidi Bou Saïd
Juste après le site archéologique de Carthage, le village perché de Sidi Bou Saïd regarde vers le golfe de Tunis. Marquée par la personnalité du saint dont il a pris le nom, le village a conservé intactes ses aspirations spirituelles et artistiques. Dans ses ruelles peintes en bleu et blanc, ornées de bougainvilliers et de jasmin, cafés traditionnels et galeries d’art contemporain se succèdent pour le bonheur des amateurs de passage. L’autre lieu à ne pas manquer ici est le célèbre Café des Nattes, qui garde en ses murs le souvenir du passage de Simone de Beauvoir, Henry de Montherlant ou Pierre Loti. Depuis sa terrasse, on observe les bateaux alignés dans le petit port de plaisance et la couleur de la mer qui se fond avec celle du ciel. Le temps semble suspendu.
Olivier Metzger
19h00
Retour à la vi(ll)e moderne
Depuis Sidi Bou Saïd, retour dans le centre de Tunis par le TGM. De là, on peut partir explorer la ville moderne, sortie de terre à l’époque de la colonisation française. Sur les larges avenues encombrées de cafés, de nombreux immeubles Art déco, Art nouveau et haussmanniens s’y alternent, à l’image du théâtre municipal ou de l’hôtel Carlton. Depuis plusieurs années, la ville moderne voit aussi fleurir de nouveaux lieux d’expression artistique comme Central Tunis, une galerie qui vise à replacer l’art au centre de la ville pour le rendre plus accessible à tous les publics, ainsi que des salles d’expositions et des résidences artistiques. La balade pourra s’achever par un verre au bar de l’emblématique hôtel Majestic, ouvert en 1913, qui mêle habilement Art nouveau et cachet traditionnel.
Central Tunis - Instagram
21h00
Dîner gastronomique
Tous les Tunisois s’accordent à dire que la meilleure table de la capitale se trouve au Dar El Jeld. Cette dépendance de l’hôtel éponyme, tenue par les mêmes propriétaires que Fondouk El Attarine, est une véritable institution en ville. A noter donc : sa renommée rend la réservation impérative. Cette formalité accomplie, on peut jouir légitimement de la magnificence des lieux – patio traditionnel fait de colonnes, céramiques, balcons filants et lumières tamisées – et des mille facettes du patrimoine culinaire tunisois. La cuisine est raffinée, le service irréprochable. Dans le cas d’une institution de ce type, on respecte le protocole et on s’habille un peu, cela va de soi. Pour terminer la soirée, filez sur le rooftop de l’hôtel voisin pour un dernier verre, pleine vue sur la médina scintillante.
Dar El Jeld - Instagram
Par
CLARA FAVINI
Photographie de couverture : Maribel Espinosa/stock.adobe.com