Conséquences parfois du réchauffement planétaire mondial, parfois de décisions économiques internationales, ou locales, ou encore de manque de moyens, une partie du patrimoine naturel, humain et culturel d’Éthiopie est aujourd'hui en grave danger.
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Les peuples de la vallée de l'Omo
Depuis des siècles, les mursis, les karos, les bodis, les kweguos, les suris, les Daasanachs, les Nyangatoms et d’autres encore, vivent sur les terres de la vallée de l'Omo. Ils ont développé des techniques sophistiquées, basées sur les crues annuelles du fleuve qui leur ont permis de survivre dans un environnement hostile, l’Omo. En décembre 2016, après 10 ans de construction très controversée, un grand barrage a été inauguré, le barrage Gibe III. Selon des experts indépendants, le barrage aura un impact terrible sur l’écosystème délicat de la région : sécheresse de la zone riveraine, disparition de la forêt lacustre. De plus, en mettant fin à la crue naturelle et à ses riches dépôts de limon, le modèle de subsistance des peuples de la région s’effondrera, exposant au moins 100 000 membres de communautés indigènes à des famines ingérables.
Yann Guiguen
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Voir le soleil se lever sur les paysages fous du Parc National du Simien
Sur les hauts plateaux éthiopiens, l'érosion a créé, siècle après siècle, les paysages spectaculaires des Monts Simien. Un paysages râpé, déchiqueté, où l'on peut marcher pour quelques jours de treks, arrivant ici au bord d'un précipice à-pic, grimpant plus loin sur le sommet d'un mont au dessin ciselé, croisant des groupes de babouin gelada ou de chèvres Walia Ibex, deux espèces particulièrement rares. Le parc est historiquement habité par les hommes – de petits villages de huttes rondes, où vous pourrez peut-être partager un café, préparé selon la cérémonie éthiopienne. Mais, avec le changement climatique, l'équilibre entre homme et nature s'est rompu : les incendies se multiplient, l'érosion des sols s'accélère, les ressources naturelles sont maintenant surexploitées et la pérennité de cet environnement de matin de monde est menacée.
Eric Souchaire
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Suivre le chemin du sel dans le désert lunaire du Danakil
C'est l'un des lieux les plus chauds au monde. Une fournaise, en dessous du niveau de la mer, où les températures peuvent dépasser les 50 degrés. Les paysages sont démentiels : on peut y voir un volcan dont les laves sont perpétuellement en fusion, des cheminées de fée aux formes et aux couleurs improbables, un lac d'acide noir. Des paysages d'une beauté d'enfer. Dans ce désert, depuis des siècles, les afar récoltent et transportent le sel, par de grandes caravanes de dromadaires – dont l'itinéraire se raccourcit peu à peu, avec la prise en charge du sel par les camions, qui s'avancent de plus en plus profondément dans le lac de sel. Mais la plus grande menace pour la vie quotidienne des afar, ce n'est pas la route avec ses camions, c'est la potasse. Des gisements gigantesques ont été découverts dans la région, et de grandes sociétés internationales ont lancé des projets d’exploitation du minerai que l'on utilise pour les engrais - la fin de ce paysage lunaire dans les zones d'exploitation.
Guillaume Philippe
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Les églises rupestres de Lalibela
Elles sont onze, cachées dans la roche depuis XIIème siècle sur l'ordre du roi Lalibela, pour former la “Nouvelle Jérusalem”. Elles sont été creusées dans la roche, en blocs monolithiques, puis on a dégagé les ouvertures, portes et fenêtres, et dedans des salles, des colonnes, des étages, agrémentés de sculptures, parfois de peintures polychromes dessinées à même la roche... enfin tout un système de fosses de drainage, des tranchées pour que les fidèles accèdent au lieu de culte, et des passages menant à des catacombes ou à des grottes d’ermites. Chacune a sa force, sa personnalité unique. Un travail tout à la fois de fourmi et de Titan.
Dégagées au XXème siècle, elles sont gravement menacées par les conséquences de secousses sismiques. Les monuments souffrent de dégâts des eaux et la plupart sont dans un état critique, certains étant proches de l'effondrement. En outre, sur ces trente dernières années, les peintures, les sculptures et les bas reliefs ont été gravement endommagés. Une grave menace pour ce site inscrit au Patrimoine Mondial de l'Humanité UNESCO.
Véronique Durruty
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Voir le lion d'Abyssinie
Ils sont aujourd'hui moins de mille. Avant, on le rencontrait dans pratiquement tout le pays. En quelques décennies, il a pratiquement disparu, tué par la pression démographique d'une population qui augmente d'un million d'habitants par an. Les territoires du félin se réduisent comme peau de chagrin, ses proies suivent le même chemin, et les paysans abattent les animaux qui pourraient s'attaquer à leur bétail. Le célèbre lion à crinière noire, endémique de la zone et emblématique du pays, risque fort de ne plus exister que sur les pièces de monnaie, les bus et la statues.