Dubaï & les Emirats

Exposition universelle de Dubaï : Voyage vers le futur

Exposition universelle de Dubaï : Voyage vers le futur

Jusqu’au printemps 2022, l’Exposition universelle Dubaï2020 réunit dans l’émirat près de 200 pays venus échanger leur vision du monde de demain. Un événement dans ce pays du Golfe résolument tourné vers les nouvelles technologies.

 

Un an d’attente. Une éternité… Dans un pays qui fêtera seulement un demi-siècle d’existence le 2 décembre prochain, patienter une année pour pousser virtuellement les trois immenses portes en moucharabieh de son Exposition universelle, retardée pour cause de pandémie, marque un réel exploit. Hier encore cité de pêcheurs de perles, Dubaï compte aujourd’hui le plus haut taux par habitant d’accès à internet de la planète. Neuf habitants sur dix ont un smartphone et surfent à la vitesse de la 5G depuis ses balbutiements. Fer de lance des Émirats arabes unis, avec son voisin Abu Dhabi, le petit émirat (grand comme la Corse-du-Sud) n’a pas pour habitude de perdre son temps. Particulièrement lorsqu’il s’agit d’avenir. La capitale, réputée pour son tourisme très haut de gamme, portée sur le luxe, le shopping et plus généralement tout ce qui brille, ne cache pas ses ambitions dans la course aux nouvelles technologies et à l’intelligence artificielle. Très engagée, Dubaï multiplie les projets futuristes. Entre robots-policiers, drones-serveurs et parcs de réalité virtuelle, l’émirat s’illustre par son projet d’Hyperloop. Un concept de transport "encapsulé" sorti de l’imaginaire de Jules Verne et concrétisé par les bureaux du milliardaire Elon Musk, à l’étude pour relier Dubaï et Abu Dhabi (environ 150 km) en douze minutes à peine. L’Exposition universelle Dubaï2020 s’inscrit bien dans cette vision d’un avenir embrassant le progrès sous toutes ses formes.

 

Le progrès en fil conducteur

"Connecter les esprits et construire le futur" est donc le mantra retenu par l’émirat pour cette grand-messe progressiste qui convoque depuis la moitié du XIXe siècle les grands esprits pour créer un monde meilleur. Des innovations qui s’expriment dans des domaines variés : sciences, culture, sport, éducation, gastronomie, architecture. Sur ce dernier plan, les capitales qui depuis près de deux siècles ont organisé une Exposition universelle en sont bien souvent reconnaissantes. Paris ne serait pas Paris sans les expositions de 1889 et de 1900 auxquelles on doit la tour Eiffel et le Grand Palais. Plus d’un siècle plus tard, en plein désert et à 40 kilomètres du Burj Khalifa, l’emblématique plus haute tour du monde, l’expo Dubai2020 est l’occasion pour 192 nations, dont la France, de briller. Au centre du site, la place Al-Wasl (mot arabe signifiant "connexion", également nom historique de Dubaï) abrite sous un dôme de 65 mètres de haut, événements culturels et projections de spectacles virtuels à 360 degrés. C’est aussi le point de convergence des visiteurs vers les trois ailes thématiques de l’exposition – Opportunité, Mobilité et Durabilité – sous lesquelles sont répartis les pavillons des pays participants.

Homme à Dubaï

The New York Times/REDUX/REA

 

Opportunité, Mobilité et Durabilité

Le premier de ses trois "districts", Opportunité, est l’occasion de voir cohabiter le pavillon du Royaume-Uni, à la façade futuriste et interactive inspirée par le génie physicien Stephen Hawking, avec celui nettement plus modeste du Malawi, basé sur l’histoire d’une famille rurale africaine. Avec l’ambition de créer des passerelles économiques, technologiques et humaines entre pays du Nord et pays du Sud, Dubaï innove en proposant pour la première fois de l’histoire des Expositions universelles un pavillon par pays, mais aussi en invitant plusieurs pays d’Afrique, habituellement grands oubliés de ces rendez-vous. Un effort humaniste visant sans doute à dissiper l’ombre qui plane sur Dubaï et les Émirats en matière de droits de l’homme (et des femmes, auxquelles un pavillon est entièrement dédié). Et pour faire oublier le présent, rien de mieux que de parler d’avenir.

 

De nouvelles façons de se déplacer

Le véritable bond dans le futur s’effectue dans l’aile Mobilité de l’exposition. Ici commence la téléportation dans les "smart cities" de demain, des villes digitalisées pourvues de nouveaux moyens de se déplacer. Le jetpack (un réacteur dorsal individuel), le plus grand ascenseur du monde (160 passagers, un cauchemar de claustrophobe), et même un vaisseau spatial à concevoir soi-même sur place s’y télescopent. On y parle aussi droïdes et métavers, fruit défendu tant attendu d’internet et de la réalité virtuelle. Bien résolus à prendre la pole position dans ces domaines, les Émirats arabes unis défendent leurs dernières innovations : des taxis autonomes (Dubaï en prévoit 4000 dans la ville d’ici 2030) jusqu’au fameux Hyperloop (à expérimenter en réalité virtuelle), sans omettre leurs ambitions spatiales, jetant là les bases d’une future mission sur Mars. Plus proche de nous, l’avenir de l’aviation commerciale est largement à l’honneur avec un pavillon des Émirats entièrement dédié à la compagnie nationale Emirates. Cette entité conçue par l’archistar espagnol Santiago Calatrava prend la forme d’un faucon (emblème national) en plein vol qui abrite sous ses ailes les avancées du secteur. Les passagers d’un vol virtuel s’installent ainsi à bord d’une cabine dans laquelle nos descendants voyageront dans cinquante ans. À chaque niveau, le pavillon passe en revue les dernières innovations technologiques : moteurs, fuselage, carburants du futur. Toutes visent à orienter l’industrie vers des solutions plus économes et moins polluantes.

paysage de Dubaï

Thomas Ebert/LAIF-REA

 

Objectif planète verte

Sans être visionnaire, Dubaï insiste sur la dimension durable du progrès et y consacre la troisième aile de l’exposition. Le septième producteur de pétrole au monde, classé au troisième rang des émissions de carbone par habitant, a bien conscience du grand défi qui attend la planète entière. Dubaï s’efforce de montrer sa détermination en évoquant des smart-cities écoresponsables, à l’instar de son quartier "Sustainable City". Un projet pilote végétalisé et alimenté à l’énergie solaire, une source loin d’être rare dans cette région du globe qui affiche des records de températures. Dubaï cherche dans toutes les directions des solutions pour subvenir à ses importants besoins en électricité (+750 % en trente ans) utilisés à 70 % pour la climatisation. L’une des pistes consisterait à utiliser ses déchets (un autre problème majeur des Émirats) pour produire de l’énergie. 

Comme nombre d’autres pays à l’ouverture de la COP26, les Émirats ont annoncé qu’ils atteindraient la neutralité carbone en 2050. À la différence de beaucoup, Dubaï peut se targuer d’avoir les moyens de ses ambitions. Le pays peut investir des milliards d’euros dans la transition écologique, pourvu que le retour sur investissement soit là. Autour du pavillon Durabilité, baptisé Terra, et sa canopée photovoltaïque, plusieurs pays font preuve du meilleur de l’ingéniosité humaine en matière de développement durable. Parmi les plus beaux exemples, on retient celui du pavillon de la République tchèque et sa poétique toile qui grâce à l’énergie solaire capte la vapeur d’eau présente dans l’air pour la réutiliser. Et le désert devient jardin.

 

Culture et téléportation

Installé dans l’aile Mobilité, le pavillon France s’inscrit dans une dynamique résumant finalement les trois districts de Dubaï2020. Conduit sous la thématique de la lumière, le navire tricolore convoque sous son toit de plus de vingt mètres de haut "la technologie, les Lumières et la science au service de notre développement commun", selon les mots du ministre des Affaires étrangères, Jean-Yves Le Drian, lors de l’inauguration. Autonome en énergie à 70 %, le pavillon une fois démonté trouvera une seconde vie à Toulouse, sur le campus du Centre national d’études spatiales. À Dubaï, la France présente trois innovations remarquables. La première, Flying Whales, est un ballon dirigeable qui permettra d’acheminer près de 60 tonnes de marchandises vers des zones enclavées, une alternative aux transports terrestres et maritimes, réduisant au passage l’impact environnemental. La deuxième, Art Explora, est un bateau-musée embarquant des expositions numériques immersives qui mèneront la culture française jusqu’aux ports les plus reculés d’Afrique, du Moyen-Orient et d’Asie. Enfin, la dernière invention tricolore à l’affiche invite à un voyage spatio-temporel. La capsule Voyager by Immertech, réservée à un public d’affaires, permet à quatre passagers de se téléporter – tout du moins d’en avoir l’impression – dans un lieu et/ou un moment historique. En en éclair, vous voilà le 21 juillet 1969, dans les bottes de Neil Armstrong, pour une petite promenade lunaire à 360 degrés. Une expérience immobile captivante qui, malgré tout, ne remplace pas un voyage à Dubaï, bien réel.

 

Par

BAPTISTE BRIAND

 

Photographie de couverture

STEPHANIE BATTET