Japon

L’art de manger au Japon

L’art de manger au Japon

Les Japonais sont des épicuriens. Du bentô quotidien aux nombreux chefs étoilés, leurs ardeurs gourmandes réinventent l’essence de la gastronomie du Japon. Et tentent de nous faire atteindre l’“Umami”. 

 

L’un des premiers saisissements d’un voyage au Japon passe par le sous-sol des “depato” (grands magasins). Si vous pensiez avoir atteint l’acmé du raffinement en faisant vos courses à la Grande Épicerie du Bon Marché, vous êtes loin du compte… Prenez les fruits, par exemple. Vendus à prix d’or, emballés individuellement dans un mille feuilles de papier de soie, puis dans une boîte avec de jolis rubans, ils semblent plus précieux que des bijoux. Mais ce n’est qu’un début, la suite de la visite s’emballe au fil des rayons de nourriture, plus ou moins cuite, plus ou moins épicée, toujours spectaculaire. Les quartiers de bœufs Wagyu, nourris à la bière et délicatement massés au saké, les poulpes géants, les armées de sushis, les cascades d’algues et les bentôs à emporter, beaux comme des tableaux. L’extase explose au rayon pâtisseries, devant ces bouchées énigmatiques mais toujours présentées avec une délicatesse infinie…

Japonais à table pour manger

Vincent Leroux

Goûter la cuisine japonaise n’est qu’une succession de surprises et d’expériences. L’aventure est au coin de la rue. Du simple “izakaya” (bistrot) au spécialiste du tempura ou du yakitori, des distributeurs de gare aux maisons de thé, l’offre est affolante, les goûts et les saveurs source de d’émotions. De frissons esthétiques aussi : la présentation des mets est aussi importante que leur composition. C’est l’empire des signes autant que des sens.

plat au japon à base de poisson cru

Gratinez

Chaque région a son identité. Tokyo multiplie les restaurants étoilés, Kyoto possède le secret du tofu, Osaka est une incorrigible gourmande. Les mers autour de l’île du Nord sont célèbres pour leurs crabes d’hiver, les distilleries d’Hokkaido et du Sendai produisent en gants blancs un whisky qui tient la dragée haute aux Écossais, le saké se boit sous toutes les formes. Sur l’île de Shodoshima, une fabrique ancestrale produit un soja vieilli en barriques pendant deux ans et millésimé !

restaurant street food au japon

Frédéric Poirier

Les nouilles à elles seules font l’objet d’une vraie culture. L’épaisse Udon, fabriquée à base de blé, la Soba de sarrasin, les Somen issues du riz, étirées à la main sur des kilomètres et séchées au soleil… Toutes se dégustent chaudes ou sur un lit de glaçons, selon les goûts et les saisons, et aspirées à grand bruit. Quant aux Rāmen ces vermicelles à la fois tendres et résistants, aigres mais doux comme du velours, on les trouve à tous les coins de rues, dans toutes les gares, nageant dans leur bouillon parfumé, avalées à toute vitesse, debout parfois. Essayez avec les baguettes !

brochettes dans un restaurant au Japon

Getty Images/iStockphoto

Mais pour débuter, le bentô, c’est bien. Cette boîte compartimentée où la nourriture est rangée avec un art consommé n’est pas sans refléter un sens de la progression dans les goûts ni une certaine idée de l’ordre ! Plus tard, lorsque vous connaîtrez par cœur votre abécédaire du sashimi, du haricot rouge, du frit, du gluant, du iodé, vous passerez au dîner kaiseki et vous apprécierez la complexité des bouchées milligrammées, portant l’empreinte des saisons. Mais il faudra du temps encore pour ne plus vous emmêler les sens et les baguettes, et un jour atteindre l’umami, la 5e saveur, celle qui synthétise toutes les autres. Ce jour-là, vous aurez le palais japonais.

 

 

Photographie de couverture

HYATT REGENCY OSAKA