Le Vanuatu offre un océan sans fin, des îles comme des perles de corail, des lagunes plus belles que les mots ne peuvent le dire. Le Vanuatu offre plus que cela : ses habitants, les ni-vatu, sont le peuple le plus heureux au monde. On y va ?
Boire le kava d’un trait, mais offrir la dernière goutte aux ancêtres, la verser sur le sol. Saveur douceâtre et poivrée qui pénètre l’esprit. Autrefois, on buvait le kava dans un silence absolu – une invitation à la méditation. Aujourd’hui, les hommes discutent les évènements de la journée dans un murmure, à peine plus qu’un souffle. La douceur du breuvage, la douceur des conversations des hommes rassemblés là, sous cet abri de palmes au bord du lagon, celle enfin du petit ressac des vagues sur le rivage nous accompagneront tout au long du voyage au pays des hommes heureux.
Tanna, cendres et corail
Parti de Port-Vila, le petit coucou atterrit enfin sur la piste. En route pour le volcan Yasur. Arbres immenses, hampes flamboyantes des gingembres sauvages, lianes des orchidées, on traverse les villages, maisons triangulaires en chaume, élevages de porcs et de volailles, jardins méticuleusement entretenus, cacaoyers, cannes à sucre, arbres à pain et bananiers. Les gamins nous saluent de grands gestes et de sourires plus grands encore – on s’arrête. Un homme vêtu d’un minuscule pagne en cuir, arc à la main, nous interpelle « comment ça va la France ? » : au cœur du Vanuatu, on parle français – de 1906 à 1980, les Français et les Britanniques ont gouverné collégialement le territoire. Ils appelaient ce dispositif « condominium », les Ni-Van parlaient plutôt de « tohu-bohu », à cause des deux bureaux de poste, des deux prisons, des deux systèmes scolaires distincts… et de règles de conduites déconcertantes, avec des voitures roulant à droite sur une partie du territoire, à gauche sur l’autre.
Reste la pratique du Français et de l’Anglais, qui s’ajoutent aux 113 langues vernaculaires de l’archipel. Et dans ce village de bout du monde, où les femmes portent pour seul vêtement un pagne d’herbes tressées, on est stupéfaits – et un peu émus, il faut le dire – quand les gamins entonnent pour nous l’hymne de la francophonie ! A la tombée de la nuit, la Land Rover cahote sur la piste de terre. On approche de Yasur, l’atmosphère s’épaissit de nuages de soufre. On parcourt les derniers mètres à pied sur la plaine de cendres, et le vent souffle en haut du volcan, immense cratère au fond duquel rougeoient quatre foyers de lave. Un chuintement, une spirale de fumée annoncent l’explosion. Une pierre jaillit très haut à la verticale, puis retombe dans le cratère – la terre gronde, le sol tremble, l’air vibre, c’est lunaire !
Ratua Private Island, au bout du monde
Un ilot de paradis, au sud de Espiritu Santo, déniché par ses propriétaires français au cours d’un périple au long cours. Coutume et kava partagé, ils se sont vus confier l’île pour un bail de 99 ans par le chef coutumier. Ils ont installé là 15 villas – les anciens greniers à grains en provenance de Sumatra ont été remontés planche après planche entre jardins et lagons.
Notre villa : 170 mètres carrés répartis en trois maisons ouvertes sur nos jardins et plage privés. Pas de climatisation, mais le souffle des alizés pour ventilateur. Pas de télévision, pas de Wi Fi, mais des récifs de corail et des criques de sable blanc, des tortues, des baignades en pleine jungle dans les « trous bleus ». Les cocotiers hochent la tête vers l’océan, la marée montante clapote contre les pirogues à balancier. A table, c’est 100 % bio et locavore : pêche du jour et légumes du potager. Au bar, un accès Internet – mais on a déjà oublié à quoi ça sert ! Reste 81 îles à découvrir. On reviendra.