Falaises tourmentées et plages dorées, landes rousses, lochs qui font pénétrer les langues de mer loin dans les terres : le littoral des Highlands écossais offre des paysages ouverts aux ciels changeants, et une lumière de commencement du monde. On prend la route à travers les landes, le long de la North Coast 500, pour vivre une émotion faite de vent et de pluie, d’immensité et d’herbes brunes en Ecosse.
Les Highlands côté mer
Aux confins de l’Europe, face à l’Amérique, les Highlands écossais, hauts plateaux aux paysages tourmentés, plus proches du cercle polaire que de Londres, habités de moutons mais vides de présence humaine, figurent parmi les régions les moins peuplées d’Europe. Ce sont de vastes étendues nues, des arpents de genets et de bruyères, et des pâturages bordés de murets de pierre sèche qui s'en vont à l'horizon. La North Coast 500 (NC500) chemine le long du littoral, serpentant au gré des falaises rocheuses qui font face aux impétuosités de l’Atlantique, et offrant des paysages démesurés.
Dessinant une boucle de 500 miles (soit un peu plus de 800 kilomètres), elle figure, au même titre que la Route One en Californie, la Great Ocean Road australienne ou la côte amalfitaine en Italie, parmi les plus belles routes côtières au monde. Une question s’impose au départ : clockwise ou counterclockwise ? Pour notre part, on recommande le sens inverse des aiguilles d’une montre, pour privilégier un itinéraire qui va crescendo et des paysages de plus en plus éblouissants au fil du voyage.
Côte Est
On part de Inverness, la plus grande ville des Highlands, pour rejoindre Dunronbin. Architecture romantique et façade blanche, Dunrobin Castle, résidence du duc de Sutherland, a des allures de château de conte de fées, tendance Walt Disney. Bibliothèque où s’alignent des milliers de livres anciens, salle d’apparat, galerie de portraits… Et, dans les jardins, les miroirs d’eau, les allées de buis, les fuchsias aux clochettes rouges et violettes, les feuilles géantes des gunneras et le fouillis de cosmos composent un paysage enchanteur. Les amateurs de rapaces peuvent assister à une démonstration de dressage au sein de la fauconnerie du château. Un peu plus loin, sur la côte accidentée du Caithness, ancien territoire viking, face à la mer du Nord, Wick est une petite ville portuaire en pierres grises aux façades rincées par la pluie, à l’élégance intemporelle. Le port vit dans le souvenir de la grande époque de la pêche au hareng, mais la distillerie Pulteney, fondée en 1826, produit toujours des single malts iodés, reconnaissables à leur salinité.
La baie de Sinclair déroule son immense plage de sable blanc. Après le petit port de Keiss, inchangé depuis des siècles, on arrive au phare de Dunscanby Head, à la pointe nord-est de l’Écosse, là où se rejoignent les eaux de la mer du Nord et de l’Atlantique. Depuis le phare, le point de vue est magique sur la série d’éperons rocheux – les « stacks » – qui émergent des eaux face aux falaises. Une promenade le long du sentier est vivement recommandée ! On peut aussi faire une halte au village de John o' Groats, dont les pierres grises sont égayées par quelques jolies maisons de type scandinave aux façades vives, bleu électrique, rouge vif, jaune canari ou vert pomme.
Heather Dickson / Fotolia
Côte Nord
La route serpente au travers d’un paysage de landes teinté d’un camaïeu de beiges. Par les fenêtres ouvertes, on respire les senteurs de tourbe noire et de fougères humides. Après Dunnet Head, les paysages se transforment pour se faire plus sauvages – ambiance de bout du monde. Une lande de bruyères à perte de vue, parfois éclairée par une trouée soudaine de soleil et, çà et là, une grappe de moutons, une maison isolée face au bord de mer : c’est un éblouissement à chaque virage. La route se fait plus étroite – on se croise grâce aux passing places.
On traverse les villages de Castletown et de Thurso. Après le village de Tongue, le lac d’eau salé Kyle of Tongue est surplombé par des montagnes aux sommets métalliques. Un peu plus loin, des plages qui semblent infinies, longs rubans de sable blanc baignés d’eau turquoise. Des plages, des plages, des plages, toutes plus belles les unes que les autres, et le mauve des bruyères. On arrive à Durness, le village le plus septentrional du pays : une centaine de maisons et une épicerie-poste. Après une visite de la grotte de Smoo au pied de la falaise, on grimpe jusqu’aux ruines du Castle Varrick, pour la vue sur la Baie de Kyle et le Mont Ben Loyal. Les îles Orcades émergent à l’horizon.
Karl Heinz Raach / LAIF-REA
Côte Ouest
Entaillée d’une multitude de lochs et de baies, la côte ouest constitue le segment le plus spectaculaire du parcours. La route serpente pour relier les villages de pêcheurs qui affleurent les eaux écumeuses entre falaise et rivage, et semblent défier les éléments. Des lochs étincelants et de vastes étendues minérales qui se succèdent pendant des dizaines de kilomètres, avec de hauts sommets en ligne d’horizon : on tombe sous le charme de ces paysages magnétiques. À partir du phare de Stoer, on enfile les chaussures de randonnée pour rejoindre l’aiguille rocheuse Old Man of Stoer.
On traverse ensuite la région la moins peuplée du Royaume-Uni – où l’on dénombre à peine un habitant au kilomètre carré. La route serpente à travers les étendues pierreuses ; pendant des kilomètres, on ne croise pas une seule voiture ! Après une halte sur la belle plage de sable blanc de Achnahaird Bay, on arrive à Ullapool. Le petit port de pêche, avec ses 1400 habitants, est le chef-lieu du nord-ouest de l’Écosse. Trois voitures et cinq vélos : après cette traversée de no man’s land, on a le sentiment, déstabilisant, d’arriver dans une grande ville ! Dernière étape à Gairloch avant de rejoindre la civilisation. Une mer déchaînée fait office de jardin public, où viennent parader aux beaux jours baleines et éléphants de mer.
Jérôme Galland
Par
MARION OSMONT
Photographie de couverture : Kristaps Ungurs / Unsplash