France

Des sommets de haute volée

Des sommets de haute volée

Flocons, cheminée crépitante, grand air euphorisant… La montagne incarne la plus belle version de l’hiver. Or, l’été s’invite aussi au sommet. Familles et naturophiles y trouvant un cadre à la hauteur de leurs ambitions sportives et contemplatives.

 

HIVER

Carte postale

Première neige. On gagne, électrisés, nos pénates d’altitude, nichés dans des bourgs pittoresques blottis à flanc de montagne qui réalisent tous les fantasmes hivernaux. Dans d’étroites ruelles, fermes anciennes et auberges gourmandes distillent les traditions montagnardes avec vue sur vallée, lac gelé ou sapins. Dans un chalet douillet, lambris, canapés moelleux et attirail cocooning en place, on opère un heureux repli vers l’intérieur. Les bûches de bois jetées dans la cheminée se consument en crépitant, enflammant les regards, réchauffant les joues rougies par le froid. Canaille, la comfort food des cimes galvanise.

Dans les massifs de la Dôle, des Écrins ou du Mont-Blanc, les soirées, chaleureuses, commencent à l’heure où le soleil se couche. La nuit tombée, on grimpe jusqu’à des repaires pleins de promesses de tablées conviviales et de fromage fondu. On redescendra à pied à la lueur vacillante des flambeaux. Sous la même neige, la montagne dévoile un versant acquis à l’esthétique et au raffinement. À Courchevel, Megève ou Chamonix, hôtels et restaurants multiplient les étoiles. Le luxe se conjugue en dix nuances de blanc, chalets design, enseignes prestigieuses et domaines XXL. Celui des 3 Vallées, le plus vaste au monde, étire entre Vanoise et Maurienne quelque 600 kilomètres de pistes – un Paris-Bordeaux à portée de télésiège.

Pour rendre les joies de la glisse éternelles, les stations se transforment et se diversifient : ski de toutes les couleurs à La Bresse, dans les Vosges, à Tignes ou Val Thorens, plus haute station d’Europe. Ski de fond à Grandvaux, dans le Haut-Jura, à Saint-Véran dans le Queyras, ou dans le familial Val d’Azun, plus grand domaine des Hautes-Pyrénées. On s’initie en famille au biathlon aux Rousses, à la frontière suisse, et à Font-Romeu, à la frontière espagnole. Autosuffisant, le ski de randonnée a partout le vent en poupe. L’effort en vaut la peine : sous les premiers rayons, peau de phoque ôtée, on file sur une neige vierge. La première trace appartient aux skieurs qui se lèvent tôt.

 

Hors-piste

Le ski n’a pas le monopole du sport d’hiver et, en marge des pistes, la montagne se vit avec tout autant d’entrain. Piolets en main, on s’essaie à l’escalade sur glace près de La Grave, la Meije en toile de fond. Encordés à des professionnels de l’alpinisme, on s’attaque aux goulottes du Triangle du Tacul, au cœur du massif du Mont-Blanc. Les ados jouent les spéléologues et descendent en rappel dans les entrailles du Vercors. Sous les pistes, grottes et forêts de stalagmites. En surface, les balades sur neige vont bon train. À Saint-Claude, dans le Jura, plus de 100 kilomètres de sentiers sont dédiés aux raquettes. On découvre, à l’abri des sapins, le calme propice à la vie animale. Les traces mystérieuses laissées par de petits êtres discrets se mêlent à celles des chiens de traîneaux. Dans une ambiance presque lapone, on goûte à la sérénité des plaines enneigées, bercé par le chuchotis des patins. Aux terrasses ensoleillées, ça bouquine au fond des transats.

Dans les spas et centres thermaux, on s’abandonne à l’oisiveté. Et plus tard à la fête, qui s’invite désormais en altitude. À Avoriaz, Val d’Isère et l’Alpe d’Huez, DJ sets au sunset, festivals en doudoune et illustres dance-floors promeuvent un autre dépassement de soi.

 

Doytcheva Somewhere Kintzing

 

ÉTÉ

Sources vives de nature

Loin des prises d’assaut balnéaires, les montagnes déploient vers le ciel des espaces infinis à la nature précieuse. Les Vosges sont couvertes de dizaines de milliers d’hectares de forêt. On les arpente à pied ou à VTT guettant le grondement d’une cascade, le scintillement d’un lac. Celui des Corbeaux, à l’ovale quasi parfait et l’un des plus beaux de la région, s’offre à la baignade. Plus grand, le lac de Gérardmer réjouit les familles à grands renforts de plaisirs aquatiques, hébergements coquets et spas éprouvés. Tout près, les tourbières de Machais et Lispach impriment sur la rétine de nouvelles couleurs : l’eau coiffée de tourbe et de nénuphars en fleurs tire vers l’orangé. Depuis le Hohneck et ses 1360 mètres, le coucher de soleil joue dans la même gamme chromatique.

Dans le Haut-Jura les terroirs, riches, organisent des balades gourmandes. On picore du Comté, on trempe le doigt dans le miel. Les vignes du plateau de Grandvaux font naître les vins emblématiques de la région, crémant et vin jaune en tête. On se lance à l’assaut des cirques : le val de la Consolation ou la spectaculaire reculée de Baume-les-Messieurs, meeting point de trois vallées. Autour courent les forêts d’épicéas dont on tire les tavaillons, petites tuiles de bois recouvrant depuis belle lurette les façades jurassiennes. Au cœur des Alpes et des Pyrénées, on rejoue La Petite Maison dans la prairie dans d’anciens chalets d’alpage enveloppés de fleurs sauvages. Réserve de biosphère allongée le long de l’Italie, le parc naturel du Queyras se respire à pleins poumons : cela sent l’herbe sèche, le mélèze et l’aventure. L’aigle royal observe le bouquetin qui observe le chamois qui observe les familles de marcheurs. Le mont Viso, de ses 3840 mètres, garde un œil sur tout, y compris sur les chemins muletiers qui sillonnent la haute montagne en contant des histoires. Saint-Véran, village haut perché, semble figé dans le temps avec ses fours à pain, ses fontaines et ses cadrans de la Renaissance. Mille mètres plus bas, à Mont-Dauphin, place forte bâtie par Vauban, expositions et mangeurs de glaces ont remplacé casernes et militaires.

De ruisseaux en chutes d’eau, de marmottes en myrtilles, les pas croisent de grands troupeaux bêlants et des cités de caractère. Les thermales Cauterets et Barèges au nord du merveilleux cirque pyrénéen de Gavarnie. La bucolique Sixt-Fer-à-Cheval, dont les vieilles fermes savoyardes et l’abbaye médiévale sont cernées par une trentaine de cascades. Au bord du Giffre, les sportifs choisissent les sensations du jour : escalade, rafting, parapente, via ferrata, canyoning, kayak, parapente. On ne compte plus les baptêmes. Inoubliable, la première nuit en refuge ouvre les yeux sur la pureté du ciel. On se découvre un cœur astronome.

 

Photographie de couverture : Julia Nimke