France

Miroir Miroir

Miroir Miroir

Une beauté déboussolante… Nature, architecture, littérature, la Provence s’impose comme l’une des plus belles régions de France. C’est le Sud ! Voyage méridional, à la rencontre d’un territoire qui, derrière ses clichés, se réinvente avec tact et discrétion.

 

Il y a trois heures à peine, le gris du ciel reflétait celui des trottoirs et l’humeur des passants. Le temps de feuilleter l’actualité, de rêver derrière une fenêtre où défilent les paysages embrumés de Bourgogne, boire un ersatz d’expresso, et déjà le ciel se déchire, laissant percer dans un flot de lumière dorée les premières crêtes de calcaire. Tinte alors l’annonce du prochain arrêt : Avignon. En ce début de mois de septembre, pas un brin de mistral pour faire voler les chapeaux, air doux et palpable, ciel bleu Klein et inévitable conditionnement pavlovien : le son des cigales. Bienvenue en Provence.

 

Oppède

Faustine Poidevin

 

Hors saison, la cité des Papes déroule son tapis ocre. Elle reçoit dans une demeure du XVIIe à deux pas du Palais, dans le plus grand jardin privé de la ville. Les murs racontent des siècles d’histoire chrétienne tourmentée, quand les placettes à l’ombre des micocouliers invitent à rêvasser. La balade prend une autre teneur lorsqu’un connaisseur propose de vous mener par le bout des papilles, de la plus ancienne boulangerie au meilleur chocolatier. Un chemin semé de rencontres avec de petits producteurs et des artisans, ravis de faire (re)découvrir leurs crus d’huile d’olive ou de château-neuf-du-pape.

 

Sous l'ocre du Luberon

Dimanche, les saveurs provençales se décuplent sur le marché de l’Isle-sur-la-Sorgue. Délicieux village lacustre où sous les façades gothiques et les roues à aubes, coule l’une des plus importantes sources d’Europe. Une “Venise comtadine” (du comtat Venaissin fondé par l’église en 1274) passée au fil des siècles d’un modeste village de pêcheurs à un grand centre de la “brocantiquité”. Deux fois par an, ses rives et ruelles accueillent une foire internationale et chaque dimanche un marché où chineurs amateurs et professionnels se tiennent à l’affût de la perle rare, avant de trinquer autour de quelques toasts de tapenade au Café de France. L’invitation à suivre les chemins d’une Provence épicurienne est lancée.

Champ de lavande

Jérôme Galland

Destination Ménerbes, petite commune du Vaucluse blottie au pied du massif du Luberon – ou Lubéron selon les camps sémantiques – dans laquelle feu Peter Mayle, le plus provençal des écrivains britanniques, avait établi le sien, de camp. Le nôtre est un mas restauré dans la pure tradition régionale, perdu au milieu des vignes. Un beau point de départ pour explorer les villages des environs. En tête d’affiche, le triplé gagnant : Gordes, Roussillon, Lourmarin.

Fenêtres village de Provence

Annanahabed

Restanques de pierres sèches tirées au cordeau et façades déclinant la palette des ocres. Une carte postale provençale. Mais il faut aussi gratter à travers les plateaux de lavande, les forêts de chênes verts et truffiers (sérieusement gardés), s’aventurer dans la combe de Buoux sous sa gigantesque falaise et remonter le cours de l’Aigue Brun jusqu’au joli hameau de Sivergues, pousser jusqu’à Saignon, Goult ou encore Saint-Saturnin et Joucas. Alors seulement se dévoile une Provence moins vernissée.

 

Abbaye en Provence

Faustine Poidevin

 

Rendez-vous ensuite au château La Coste afin de bousculer l’image d’Epinal de la région. Le domaine cultive de concert vins biodynamiques, architecture et art moderne. Entre les vignes et le chai signé Jean Nouvel, se dresse un centre d’art réalisé par un autre starchitecte, le Japonais Tadao Ando. À l’extérieur poussent les œuvres de Louise Bourgeois, Alexander Calder, Hiroshi Sugimoto, Frank Gehry, Ai Weiwei et d’autres grands land artistes non provençaux.

Chateau La Coste

Valentine Vermeil

 

Heureuses Alpilles

Cinquante kilomètres plus à l’ouest, suivant un fil géologique qui enjambe la Durance, la crête du Luberon s’émousse pour devenir celle des Alpilles, ciselant au passage d’autres paysages. À son pied, des champs d’amandiers et d’oliviers, quelques vignobles aussi, émergent d’un sol de rocaille blanc. Une terre foulée depuis l’Antiquité qui garde d’importants témoins des civilisations grecque, celte et romaine, à l’image du site de Glanum, habité depuis le VIe siècle avant J.-C. Les Alpilles sont une véritable frise à ciel ouvert ponctuée de villages emblématiques : Eygalières, Saint-Rémy, les Baux-de-Provence – bastions de l’art roman, néo-roman et Renaissance.

Eygalières

Eberhard

Pris d’assaut en été, autrement plus séduisants au printemps et à l’automne, ces joyaux minéraux ne se contentent plus de leur patrimoine historique, mais dictent aujourd’hui les codes d’un nouvel art de vivre provençal. Une créativité qui joue avec le terroir et l’époque.

Elle s’exprime entre les murs, notamment chez une ex-vedette du cinéma français qui reçoit en toute discrétion. Un mas douillet qui, entre des lignes contemporaines, chouchoute ses hôtes : terrasse privée, piscine chauffée, sols rafraîchissants ; yoga et massages ayurvédiques ; petits déjs bio à base d’œufs de la ferme et de miel du village.

Bastide des Gordes

Faustine Poidevin

Le vent nouveau des Alpilles souffle aussi côté déco (une journée à Saint-Rémy et votre appartement prend un coup de frais), et bien sûr dans l’assiette, où les escargots côtoient volontiers les salades thaïes. Les jours de marché (mardi, jeudi, samedi et vendredi en saison) sont l’occasion de remonter à la source des bons produits. On en profite pour échanger, palper, humer, goûter et sélectionner, aujourd’hui sous l’œil d’un chef jouant à domicile, les produits qui lors d’un atelier cuisine cet après-midi, deviendront petits farcis, asperges aux truffes et autres beignets de fleurs de courgettes. Une cuisine au fil des saisons et des produits locaux qui font écho aux portes de la Camargue, dans le potager de la Chassagnette, le restaurant de l’étoilé Armand Arnal.

 

Arles

Jérôme Galland

 

C’est l’un des musts d’Arles, ancienne capitale provinciale de la Rome Antique, qui cumule patrimoine mondial et saveurs locales. Exception à la règle, Arles mérite bien une visite estivale, lors des Rencontres de la photographie, qui réunissent un grand panorama de la photo contemporaine. Avant le dernier clap, on s’échappe pour un bain sauvage à Beauduc, et une nuit rétro contemporaine à Uzès. Mêmes parfums de garrigue et de pierres millénaires, pourtant la Provence laisse place ici à l’Occitanie, aux portes d’un autre Sud.

 

PARTIR EN PROVENCE AVEC VOYAGEURS DU MONDE

Voyageurs du Monde propose une découverte intimiste de la région. Un parcours triangulaire reliant Avignon, Eygalières et Uzès. Étapes de (grand) charme dopées de pauses culturelles et savoureuses. Balade gourmande en Avignon, atelier cuisine après le marché et Arles en privé sont au programme. Un doux équilibre entre Provence essentielle et contemporaine.

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Photographie de couverture

ANDREAS KARELIAS