France

Radio Voyageurs : 100% France

Radio Voyageurs : 100% France

Avec Faustine Poidevin, chef de projets France chez Voyageurs du Monde, Jean Imbert, chef cuisinier, Jean-Pierre Chanial, journaliste, écrivain, grand voyageur, Michel-Yves Labbé, président de l’application Départ Demain et Jean-François Rial, président de Voyageurs du Monde. 

 

Voyageurs du Monde propose désormais à ses clients de découvrir la France. « Pourquoi cette décision ? », interroge Valérie Expert. « Il y a un paradoxe chez nous, on propose des voyages dans 135 pays mais on ne propose pas la France, à part la Corse. Or plus de 30 % de nos clients ne sont pas français », explique Jean-François Rial. Proposer la France est donc presque devenu obligatoire. « Ca a poussé Voyageurs du Monde dans ses retranchements car l’offre doit aussi s’adresser aux Français. Il a donc fallu être extrêmement créatif pour sortir de ce que font les autres voyagistes en France, à savoir proposer des hébergements sympathiques et des séjours, poursuit Jean-François, nous avons donc essayé de décliner sur la France tout ce qu’on fait ailleurs : les rencontres particulières, le service conciergerie, des voyages itinérants, des contenus originaux, des façons de visiter les sites autrement ». Pour lui, le un vrai pari c’est de faire passer les Français par des intermédiaires comme Voyageurs du Monde pour trouver de la différenciation, de la valeur ajoutée et du contenu à leur voyage en France.

« Voyager en France comme on voyage à l’étranger »

Valérie Expert résume le concept : « il s’agit de voyager en France comme on voyage à l’étranger ». Elle enchaîne en interrogeant Faustine Poidevin sur le choix des propositions de voyage. « On croit qu’on connaît la France mais on connaît surtout des régions que l’on traverse pour aller dans des maisons familiales. Voyageurs du Monde ne va pas proposer Courchevel par exemple mais des petites stations avec des hôtels de charme. On va se centrer d’abord sur l’hébergement. En France, on a la chance d’avoir des hébergements de dingues », explique-t-elle.

 

Les petits coins de France des invités

Valérie Expert demande ensuite à ses invités de raconter son petit coin de France préféré. Pour Jean Imbert, c’est les Sables d’Or, un petit village de quarante habitants en Bretagne. « J’ai construit là-bas une cabane écologie perchée dans les arbres avec tout un jardin en permaculture . On y propose via Voyageurs du Monde des weekends en auto-suffisance », raconte-t-il. Il parle aussi de Saint-Malo, de Dinard, de l’île de Cézembre et de Cancale puis avoue que depuis cinq ans, la plupart des voyages qu’il fait sont en France : « Je prends ma voiture, je parcours parfois 2 500 km en quatre jours, je sors des autoroutes, je fais souvent ces voyages pour rencontrer les producteurs »…

buron de Niercombe

Jérôme Galland

 

Pour Jean-Pierre Chanial, « la France impose une lecture à deux étages : celle des touristes - 90 millions chaque année - qui pour la plupart se figent sur les Champs Elysées, les Galeries Lafayette, la Tour Eiffel, les châteaux de la Loire et Euro Disney; et notre lecture à nous : celle de la multiplicité des terroirs, des régions, des richesses. On a la chance de parler la langue, de pouvoir s’installer sur un petit marché de province, c’est un moment de contact et de communion avec quelque chose de vrai ». Il accompagne ses paroles de chiffres en précisant que la France ne compte pas moins de 154 cathédrales, 90 000 restaurants, 155 000 hôtels, de 1 000 festivals en été, sans oublier les milliers de châteaux. Il parle aussi de l’effervescence de grandes villes telles que Marseille, Lille, Arras, Metz, Strasbourg, Bordeaux, Lyon…

Jean-François Rial, lui, parle d’endroits qu’il trouve « hors catégories » comme la Lozère.  Michel-Yves Labbé surenchérit avec le Var. Ils parlent aussi de « déserts » comme le Massif Central où la plupart des hébergements sont sommaires et « où il faut faire 40 km pour trouver un resto moyen », selon Michel-Yves Labbé. Jean Imbert met un bémol : « la France reste quand même le pays numéro un au monde sur les auteurs - les chefs et les restaurateurs -. On peut voyager partout ailleurs, il n’y a pas ce niveau de chefs et d’auteurs ». Il ne parle pas que des étoilés mais aussi de restaurants simples et donne l’exemple d’une maison d’hôtes familiale dans les Alpes où on ne propose que des raclettes succulentes, avec la grand-mère en cuisine !

 

Organiser son voyage

Michel-Yves Labbé aime beaucoup la France mais « il faut être très organisé et ne pas se leurrer : il n’y a pas que du bon dans les terroirs ». Il raconte être sorti de l’autoroute entre Toulouse et Limoges à l’un des multiples panneaux « village touristique, avec fourchette et couteau » vers 13h30 « et là, il n’y avait plus personne pour vous servir à manger » ! Valérie Expert rétorque qu’il en est de même dans les autres pays mais Michel-Yves Labbé n’est pas d’accord : « vous allez en Italie par exemple, vous tombez sur une trattoria où vous allez toujours manger très correctement ». Il enchaîne sur l’hôtellerie française en précisant que, là aussi, « il y a du bon mais aussi du beaucoup moins bon ». Il insiste donc sur le fait qu’il faut être bien organisé et salue l’initiative de Voyageurs du Monde et ses étapes bien choisies.

Agence Voyageurs du Monde

Jean-François Rial confirme : « la France a vécu pendant des années sur son histoire, ses paysages, sa culture, mais depuis cinq ans, enfin, on arrête de se reposer sur ses acquis naturels. Une créativité délirante est en train d’arriver dans les hôtels et les restaurants ». Cependant, il met en garde les auditeurs : « sur 155 000 hôtels en France, il y en a peut-être 5 000 qui sont bien. Il faut chercher, c’est l’enfer » ! Faustine Poidevin confirme : « On a de plus en plus de maisons familiales qui deviennent des petits hôtels de quatre chambres, il faut les trouver, il y a beaucoup de recherche à faire ».

 

Donner l’envie de voyager en France

Elle insiste aussi sur l’aspect « rencontres » avec les producteurs, les cuisiniers mais aussi les artisans. Valérie Expert évoque les chalets confidentiels que Voyageurs du Monde propose. « Il s’agit de location de petits chalets. C’est très privilégié, dans des petits villages avec du service haut de gamme, une sélection que personne n’a. A côté de ça, on a aussi quelques petits hôtels et des grands noms pour les initiés comme La Bouitte dans les Alpes ». Voyageurs du Monde propose aussi le Périgord avec des expériences et des rencontres : « un bon combiné qui peut marcher avec tout ce qui est sud-ouest et Auvergne, c’est le produit qui marche le mieux pour l’instant », précise Faustine Poidevin. Valérie Expert cite l’exemple d’un road-trip entre Rennes et Vannes, « une idée à laquelle elle n’aurait jamais pensé ». Faustine Poidevin met en avant les régions dans lesquelles, « les prestataires savent très bien se vendre ». Elle en profite pour mettre en avant d’autres destinations pour les mois à venir : « le Périgord, la Champagne pour Pâques, l’Alsace en dehors de la période de Noël et la Corse pour l’été ».

 

Quelques pépites révélées mais gare au service !

Les invités de Valérie Expert repartent sur les routes de France et révèlent quelques trésors insoupçonnés. Jean-Pierre Chanial a plusieurs coups de coeur : « la Lozère, parce que j’en suis originaire, mais n’ayant ni infrastructure de restauration ni hôtellerie, c’est un peu difficile à vendre… » Il résume également ce qu’il a entendu précédemment : « il y a une frontière entre l’acquis - merveilleux - et le service parfois à la dérive ». Il donne l’exemple du Massif Central et du manque de services, du coup il conseille cette destination pour le tourisme vert : « allez faire du cheval autour de la Margeride - où il y a la bête de Gévaudan -, c’est exceptionnel, faites de la randonnée sur le chemin de Stevenson, faites du vélo ! C’est la France vraie, celle qui fait les châtaignes, la confiture, celle qui va cueillir la mousse sur les arbres ». Il donne aussi l’exemple d’une petite région qui lie tout : gastronomie, paysages, culture…  Il fait monter le suspense avant de révéler qu’il s’agit de la Bourgogne et d’un bout de route de 64 km de Dijon à Beaune : « une pure merveille de nature avec des coteaux vallonés, les plus grands crus de la région, des grands hôtels, des cathédrales, les Hospices de Beaune, les forêts du Morvan. Vous avez tout dans ce petit réduit de France, du pur bonheur » !

Chalet 1864

Chalet 1864

Michel-Yves Labbé évoque la petite ville de Châlon-en-Champagne où il a découvert un musée d’art roman extraordinaire, « et en revenant, vous faites les caves de Champagne, voilà un beau voyage dans un endroit qu’on n’imagine absolument pas ». Il vente aussi les mérites du Var où il vit. « Tout ce dont vous parlez, la randonnée, le cheval, vous pouvez le faire toute l’année dans le Var » ! Toutefois, il précise que le service est moyen : « les Varois considèrent que Dieu leur a donné le plus beau coin du monde et ils savent que deux mois par an, ils seront pleins. Donc ils ne font pas trop d’efforts, ce qui est dommage ». En ricochet à Jean-Pierre Chanial, précise aussi que pour lui, la France, ce n’est pas seulement les cathédrales mais aussi les musées.

 

Vend-on suffisamment la France ?

Valérie Expert pose alors la question de la mise en valeur de la France : « la vend-on suffisamment ? », interroge-t-elle. Jean-François Rial se plaint d’institutions engoncées dans le passé : « Ce n’est même pas une question de budget, au Comité Interministériel du Tourisme par exemple, ils sont obsédés par la gastronomie, le vin, les châteaux de la Loire, Euro Disney. Mais tout ça, ce n’est pas ce qui fait la valeur ajoutée de la France ».Tourné vers le présent et l’avenir, il salue des initiatives comme celle de Septime qui vient d’ouvrir un hôtel restaurant au coeur du Perche. « Et il y en a de plus en plus. Je parie que dans le Cantal, dans la Lozère, dans l’Aveyron, dans le Cher, il y aura des endroits comme ça, comme la Grenouillère aussi dans le Pas-de-Calais. Des endroits où on trouve une nature exceptionnelle mais aussi un service excellent. C’est ça qui doit faire la différence de la France de demain ».

 

La carte postale de Michel-Yves Labbé : la belle histoire de Porquerolles

La carte postale de Michel-Yves Labbé commence en Wallonie le long d’un canal très embrumé entre Charleroi et Bruxelles, au milieu du XIXème siècle. Un batelier transporte le charbon de la vallée de la Meuse. Concurrencé par le chemin de fer, il a une vie de misère. Un de ses enfants, François-Joseph, est repéré par son instituteur qui le trouve vif et intelligent et insiste pour qu’il poursuive ses études. Il y reste jusqu’à 14 ans et entre aux chemins de fer. Puis, l’appel de la grande ville se manifeste. A 20 ans, il est à Paris. « Livreur aux Halles, ouvrier mécanicien, garçon de laboratoire au musée d’histoire naturelle où il découvre la minéralogie qui le passionne, il suit aussi des cours du soir aux Arts et Métiers », raconte Michel-Yves Labbé. C’est là qu’il se lie d’amitié avec un certain Louis Bourdon, fils d’un riche industriel. Il poursuit : « impressionné par le gamin, le père Bourdon - c’est lui qui a inventé le marteau pilon à vapeur - recommande François-Joseph à un de ses amis canadiens. Le voilà parti pour la construction du Canadian Pacific Railway, un chantier titanesque qui traverse les Rocheuses ». Il est chef d’équipe et fait des miracles en terminant dans des délais déments, tout en ayant la réputation de bien traiter ses ouvriers.

Île de Porquerolles

Hyères Tourisme

François-Joseph entend ensuite parler de la ruée vers l’or. Il part pour San Francisco mais il se rend vite compte qu’il est arrivé trop tard. Il repart pour le canal de Panama. Il devient chef d’équipe d’une barge qui creuse le canal mais il attrape la fièvre jaune. Il survit et part au Mexique où il travaille pour une grande compagnie minière, cherche de l’or de manière industrielle, et finit par monter sa compagnie, Los Dos Estrellas - les deux étoiles -. Michel-Yves Labbé reprend : « il creuse de l’autre côté de la vallée suscitant moquerie et sarcasme mais il a étudié la minéralogie, il est sûr de lui et finit par trouver un énorme filon, une montagne d’or. François-Joseph Fournier devient l’homme le plus riche de la terre » ! Idéaliste, il construit une ferme moderne dans la vallée, la Colonizadora, Le Mexique plonge alors dans la révolution. François-Joseph met ses billes en Amérique et rentre à Paris, cousu d’or. « Un jour il voit l’affiche d’une île à vendre, Porquerolles, il l’achète en 1912 et l’offre à sa femme. Il y crée une société idéale, autonome, riche des cultures fruticoles et de la vigne. Il loge dignement et gratuitement les ouvriers, donne à chacun un bout de terrain », enchaîne Michel-Yves Labbé. C’est aussi là qu’il meurt en 1935 à l’âge de 77 ans. « Quand vous voyez la place de Porquerolles, elle ressemble beaucoup à une hacienda avec en point d’orgue l’église, une vraie mission mexicaine. Porquerolles c’est un beau coin de la Méditerranée et en vous souvenant de cette histoire, vous allez adorer », conclut-il. Pour y dormir, il conseille vivement le Mas du Langoustier ou le Manoir de Port-Cros, la petite île voisine.

 

Quelques belles adresses de plus

Pour finir en beauté, les invités de Valérie Expert dévoilent quelques adresses qui leur sont chères : la Divine Comédie à Avignon, un petit hôtel dans le plus grand jardin de la ville, l’île de Saint Honorat sur la Côte d’Azur, un monastère où on peut rester une ou deux nuits ou plus, l’Ile aux Moines dans le Golfe du Morbihan, où l’on dort à l’hôtel San Francisco, l’île de Cézembre, entre Saint-Malo et Dinard, un repaire de corsaires dont l’unique restaurant propose ce que le patron a pêché le jour-même, le bassin d’Arcachon où l’on mange des huitres devant la dune du Pilat, la petite ville d’Aurillac… « Il y a plein d’endroits à découvrir mais on n’a jamais rien dans le voyage sans efforts », telle est la conclusion de Jean-François Rial

 

Photographe de couverture

PAULINE CHARDIN